Dans FAMILY THERAPY, un jeune français pose ses bagages chez une famille bourgeoise, au beau milieu de la forêt slovène. De quoi semer le trouble dans ce foyer à l’apparence parfaite.
Ah, les bourgeois… Une frange de la population malmenée depuis quelques années – au cinéma, bien entendu. Souvent confrontés à leurs pires ennemis (les pauvres), ils sont tour à tour traqués, blessés ou punis. Pour notre plus grand plaisir.
Cette fois, c’est au tour d’Aliocha Schneider de rejoindre son paternel et sa famille en Slovénie. Son arrivée va chambouler l’équilibre du clan, cloîtré dans sa vaste villa en forêt.
Un souvenir tenace
À l’origine du film, un souvenir d’enfance de la réalisatrice. Du genre qui vous marque à vie. La voiture de ses parents en feu, garée en urgence sur le bas-côté. Puis ce véhicule qui les a frôlés, sans jamais s’arrêter. Qui étaient-ils ? C’est sur cette vision que Sonja Prosenc choisit d’ouvrir FAMILY THERAPY « : la bourgeoisie fuyant les classes inférieures et ne leur portant pas secours. »
Ce clivage social se révèle aussi à l’arrivée de Julien, fraîchement débarqué en Slovénie. Sa première rencontre avec la famille se fait à l’aéroport, sur des tapis roulants. Eux vont dans un sens, lui dans l’autre. Présenté à contre-courant, il ne parviendra jamais à serrer la main de son père. Subtile, vous avez dit ?
Des personnages aux archétypes bien tracés
De FAMILY THERAPY, on ne retiendra pas la finesse du scénario, qui convoque des archétypes : la mère malheureuse dans son couple, le père obnubilé par un voyage spatial, la fillette rêvant d’émancipation.
Sans oublier ce français aux intentions troubles, synonyme de vent de pagaille (et de liberté). Dans le rôle, Aliocha Schneider se révèle être un excellent choix. Il livre une performance mystérieuse, amusé à l’idée de semer la zizanie dans ce foyer.
Une mise en scène millimétrée
Dans ce cercle clos où la perfection règne, rien n’est laissé au hasard. Un credo que Sonja Prosenc applique aussi à la composition de ses plans. L’image est d’abord distante, à l’instar de ces personnalités insaisissables.
Puis, lorsque les premières fissures apparaissent, la caméra s’approche. Elle apprivoise doucement cette bourgeoisie qui, enfin, laisse entrevoir son humanité. Au cours de la deuxième moitié du film, l’accent est mis sur l’empathie. Car derrière le portefeuille bien garni, il y a un cœur qui bat.
Tel est le parti-pris de FAMILY THERAPY « : refuser le règlement de compte. Hors de question de se venger sur ce clan aisé, en leur faisant payer leur mépris. Au contraire, la cinéaste leur offre même une porte de sortie. »
Seulement des chimères
À l’image, les ralentis se multiplient, accompagnés de musique classique. Des morceaux issus de l’opéra King Arthur, retravaillés par le tandem électro Silence. De quoi conférer un caractère épique à des scènes du quotidien. Du moins, dans l’imaginaire de nos protagonistes.
Cette vie grandiloquente, ils sont les seuls à y croire. Ils souhaitent être des modèles, le genre de clan qu’on cite comme inspiration. Il n’en est rien. Derrière les apparences, il n’y a que des failles, des silences et des tensions impossibles à masquer.
Plus qu’un portrait de famille, FAMILY THERAPY met en lumière une illusion : celle d’un bonheur sous vitrine, prêt à se fissurer dès qu’on s’en approche.
Lisa FAROU

Source: Le Blog Du Cinéma