François Ozon revisite un monument de la littérature avec son adaptation de L’Étranger d’Albert Camus, actuellement en salles. Mais savez-vous quel est son film primé le mieux noté sur AlloCiné ?
Gaëlle Robert
Une fourchette dans une main, les yeux sur l’écran, Gaëlle Robert est une vraie cinéphage. Journaliste gastronomique le jour, spectatrice assidue la nuit, elle dévore aussi bien les assiettes que les films. Ses péchés mignons : les teen movies et l’animation, qu’elle engloutit sans modération.
Récompensé notamment par le Grand Prix du Jury à Berlin et le César du meilleur film, François Ozon s’impose comme l’un des auteurs majeurs du cinéma français contemporain. Cinéaste prolifique et audacieux, il revient presque chaque année en salle avec un nouveau long-métrage. Révélé à la fin des années 1990 avec Sitcom et consacré par des œuvres comme 8 Femmes, Swimming Pool ou Été 85, il s’attaque aujourd’hui à un monument de la littérature : L’Étranger d’Albert Camus.
Tourné en noir et blanc, ce film transpose à l’écran la trajectoire de Meursault, interprété par Benjamin Voisin, jeune employé indifférent qui enterre sa mère sans émotion avant de reprendre sa vie banale. Sa liaison avec Marie (Rebecca Marder) et la rencontre avec son voisin Raymond Sintès (Pierre Lottin) le mèneront peu à peu vers un drame sous un soleil écrasant. Présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise, L’Étranger confirme le goût d’Ozon pour les adaptations audacieuses et les portraits d’âmes en marge.
Son film le mieux noté…
Sorti en 2019, Grâce à Dieu marque un tournant dans la filmographie de François Ozon. Inspiré de l’affaire Preynat, le film aborde avec une sobriété remarquable le scandale des abus sexuels au sein de l’Église catholique à travers le combat de trois hommes décidés à briser le silence. Porté par Melvil Poupaud, Denis Ménochet et Swann Arlaud, il mêle courage civique et émotion contenue, dressant un portrait bouleversant de la parole libérée.
La même année, Grâce à Dieu reçoit le Grand Prix du Jury à la Berlinale, avant d’être nommé dans sept catégories aux César 2020, où Swann Arlaud remporte celui du meilleur acteur dans un second rôle. Salué par la critique, le film s’impose comme l’une des œuvres les plus puissantes et engagées de François Ozon.
Avec plus de 5800 notes et près de 480 critiques, Grâce à Dieu affiche une note de 4,2 sur 5 sur AlloCiné, en tête de la filmographie du cinéaste.
L’avis des spectateurs
Mat niro (5/5) : « François Ozon signe ici un véritable chef-d’œuvre en dénonçant la pédophilie dans l’Église catholique française. Il s’intéresse aux agressions sexuelles commises par le Père Preynat et ne s’interdit rien. Pour incarner ces enfants cabossés par leur enfance, il sait trouver les acteurs justes avec Melvil Poupaud, Denis Ménochet et surtout Swann Arlaud qui est une nouvelle fois bouleversant. Les réactions des personnes proches des victimes sont dépeintes de manière subjuguante, entre les non-dits et les soutiens. De tout cela, on retiendra la souffrance des enfants devenus adultes et le récit documenté d’un film nécessaire où François Ozon atteint le sommet de son art. Magnifique malgré la gravité du sujet ! »
Christoblog du Club Allociné (5/5) : « En choisissant de s’attacher au cheminement personnel de trois des victimes du Père Preynat, plutôt qu’à l’enquête en elle-même, François Ozon réussit un coup de maître. (…) Le spectateur est plus d’une fois submergé par l’émotion durant ce film. Le scénario à la fois fin et détaillé, la mise en scène sobre et prenante : tout concourt à nous prendre à la gorge, au cœur, et aux tripes. »
Mais le plus remarquable dans ce très beau film, c’est la prestation des trois acteurs principaux. Melvil Poupaud, en fervent catholique tenace et un peu naïf, est comme d’habitude parfait. Denis Ménochet trouve dans ce film un rôle qui lui convient à merveille : athée gouailleur et gentiment éruptif, il a un petit quelque chose de Depardieu. Quant à Swann Arlaud, il livre une prestation exceptionnelle, donnant ici le meilleur de lui-même : sensible, écorché et fragile.
Le film est un miracle : il parvient à émouvoir constamment sans accabler les bourreaux, qui paraissent au final faibles et ridicules. Le meilleur film d’Ozon, et probablement un des meilleurs films français de 2019. »
Pierre E (5/5) : « Difficile de dire quoi que ce soit de ce grand film sans le diminuer, tant les mots manquent pour l’encenser. 2h17 d’émotion pure, de colère, de dégoût, de rage, de questionnement. On en sort véritablement bouleversé. Et pourtant, pas de grandiloquence, pas d’effets superflus. Le cinéphile amateur en oublie de s’intéresser au scénario, à la mise en scène, au jeu des acteurs, au décor, tant le traitement du sujet et la fluidité de la narration sont proches du parfait. Une plongée dans le monde des hypocrites, de ceux qui se sont tus, de ceux qui protègent le crime et bafouent la foi et la loi, mais aussi et surtout dans le combat de celles et ceux qui ont osé défier l’ordre soi-disant moral. Un monument. Dieu que j’aime le cinéma quand il est à ce niveau-là !
Krebs (5/5) : « François Ozon signe un film qu’on n’est pas prêt d’oublier avec ce « Grâce à Dieu ». Son thème concerne la pédophilie des prêtres, vue à travers le prisme des victimes, qui ont toutes réagi différemment face à ce qu’elles ont subi – à la fois dans leur construction d’homme adulte et dans leur relation à l’Église et à la religion. Sont particulièrement bien mises en évidence les réactions des proches (parents, frères, épouses), qui permettent de comprendre comment de tels actes ont pu persister si longtemps impunis… et combien l’incompréhension de certains a pu être forte. (…)
Le film frappe par sa pudeur, sa nuance et sa retenue, tout en faisant partager au spectateur les émotions et sentiments des victimes, de leur entourage et de l’Église également. C’est donc un moment de cinéma dont on ressort avec une meilleure compréhension des mécanismes et conflits issus de ce sujet, à la fois chez les victimes et l’Église. Les acteurs sont exceptionnels et le rythme sans temps morts. Un film à ne pas manquer. »
Fred M. (5/5) : « Un grand film. De grands acteurs. Un grand sujet. Et un grand réalisateur. C’est un film puissant qui nous saisit de la première à la dernière seconde. Une mise en scène aride et habile qui nous fait sentir le poids du secret, de l’Église et du non-dit. Des personnages principaux passionnants et magistralement interprétés. Des seconds rôles tout aussi réussis. Et un film qui nous reste longtemps en tête. »
Source de l’article : AlloCiné