« La Communication cinéma de l’Europe pourrait remettre en cause le système de soutien français au cinéma et l’agrément des films »

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tournage film cinema
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Une rencontre riche tant le cinéma a été marqué ces dernières années par de nombreux débats professionnels, depuis notamment le rapport du Club des 13 et celui confié à René Bonnell sur les rapports entre auteurs et producteurs.

Olivier Wotling rappelait que la mission de René Bonnell avait permis d’aboutir à une réelle avancée en favorisant la transparence des relations entre producteurs et auteurs, notamment quand des rémunérations complémentaires sont prévues. Désormais, c’est une obligation qui a été réglementairement étendue, les producteurs doivent pouvoir définir un coût du film, établir un relevé des recettes et calculer l’amortissement.

Au-delà, l’accord professionnel qui avait été conclu entre auteurs et producteurs prévoyait en particulier l’établissement d’audits de compte. Chaque année, le CNC doit organiser et prendre en charge l’organisation de 10 audits (5 tranches de budget ont été définies) afin de vérifier le calcul du coût du film et de son amortissement et de s’assurer que les remontées de recettes et d’information aux auteurs ont été correctement réalisées.

Jacques Fansten regrettait que ces audits ne soient pas publics et relèvent davantage d’une transparence dans le secret qui affaiblit de fait la dimension pédagogique du contrôle.

Si les conclusions de cette première session d’audits seront rendues publiques très prochainement, Olivier Wotling a déjà donné quelques éléments d’information : c’est un dispositif de contrôle qui monte en charge et qui a permis de réaliser cette année 8 audits.

Globalement, aucune infraction importante n’a pu être constatée et les auditeurs ont constaté une généralisation des bonnes pratiques, même s’il reste toutefois des écarts résiduels sur la calcul du coût des films (placements de produits pas pris en compte, ristournes des laboratoires non intégrées dans le coût du film…).

Parmi les 8 films audités, un seul était déjà amorti, après 6 mois d’exploitation. Les auteurs avaient d’ailleurs été informés par le producteur de cet amortissement.
L’une des leçons de cet audit serait, pour Olivier Wotling, d’accroître la discipline des producteurs en matière d’information aux auteurs.

Cet accord Bonnell n’a malheureusement pas pu être complété par des accords analogues avec les autres acteurs de la chaîne. Olivier Wotling regrettait à cet égard que les discussions qui avaient été ouvertes entre producteurs et distributeurs soient aujourd’hui bloquées.

Il reste toutefois optimiste, sachant que ces débats sont relancés dans le cadre de deux instances : 1) le groupe de suivi des Assises du Cinéma qui a placé la question de la transparence au cœur de ses réflexions ; les audits nombreux de l’Inspection générale des Finances, de la Cour des Comptes et des assemblées parlementaires devraient inciter les professionnels à essayer de trouver un compromis et d’aboutir enfin à un accord ; 2) la négociation sur la Convention collective dans laquelle les conditions de participation des techniciens et salariés vont être un axe central des discussions.

Pour sa part, le CNC doit se contenter de mener une mission de bons offices car il n’a pas statutairement de pouvoirs de contrôle sur les recettes commerciales d’exploitation des films, même s’il pourrait être envisageable à terme de pouvoir moduler le soutien en fonction de comportements, soit pour les encourager, soit pour les limiter.

Ces discussions professionnelles prennent également place dans un cadre européen strict et qui tend à vouloir rogner la spécificité dont bénéficie la culture en général et le cinéma en particulier. La Commission européenne a mis sur la table un projet de communication cinéma, qui permet de déterminer les critères de validité des aides au cinéma. Or, ce projet est aujourd’hui lourd de menaces, notamment sur la territorialisation des aides et la nécessité de justifier d’activités en France pour bénéficier des aides françaises : pour la Commission, une dépense française serait une quelconque dépense effectuée sur le territoire français, quelle que soit la nationalité du prestataire ou du droit applicable aux contrats de travail.

Les conditions qui sont aujourd’hui exigées seraient caduques : les sociétés ne devraient plus nécessairement être établies sur le territoire français, les contrats de travail ne devraient plus répondre aux exigences du droit français…

Cette nouvelle orientation obligerait à revoir complétement les conditions de l’agrément qui s’établissent actuellement autour d’un barème de 100 points. Au moins, 70 points seraient illégaux au regard de cette éventuelle réglementation européenne.

Olivier Wotling a profité également de sa présence pour faire un bilan du compte de soutien aux auteurs qui a été récemment mis en place. Cette aide, dotée d’un budget global de 800 000 €, permet aux auteurs d’un film agréé l’année précédente, avec un budget de moins de 4 millions d’€ et sans chaînes en clair à son financement (à l’exception d’ARTE), de pouvoir bénéficier l’année suivante d’une aide automatique de 10 000 €. Cette aide se fixe un objectif : permettre aux auteurs de ces films d’avoir du temps et de la liberté pour concevoir un nouveau projet de film avant de le soumettre à un producteur.

Au terme de la 3ème année d’exercice, chaque année, entre 40 et 50 films sont éligibles, soient environ 80-90 auteurs. L’an dernier, la moitié des auteurs éligibles ont fait valoir leurs droits. C’est un chiffre qui progresse tous les ans.

Enfin, Olivier Wotling est revenu sur l’avance sur recettes dont les fondamentaux n’ont pas évolué : les critères de cette commission sont toujours basés sur une évaluation et une anticipation artistique du projet. L’an dernier, 50 projets ont été aidés dans ce cadre, dont la moitié était des 1ers films.

Quelques évolutions notables néanmoins : depuis un an, pour les projets qui arrivent en plénière, la possibilité est donnée aux équipes d’être auditionnées pour leur permettre d’apporter des éléments d’information complémentaires.

Cette avancée prend place dans un contexte marqué par une forte dégradation des financements sur les 1ers films et une prépondérance encore accrue des aides publiques dans leur montage financier. Plus généralement, la production française semble à nouveau s’organiser autour d’une bipolarisation entre, d’un côté, des films très chers et, de l’autre, des films dont le budget est inférieur à 4 millions d’€. Ce sont désormais près de 50% des films qui peuvent être rangés dans cette dernière catégorie.

Source : SACD

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