Amalric fait son cinéma

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mathieu amalric
mathieu amalric
 

Il est monté sur scène. Le sourire crispé et le regard perdu. “C’est un moment étrange, dit-il. Un mélange d’incrédulité et de surprise.” Mathieu Amalric vient de recevoir le prix de la mise en scène pour son (beau) film Tournée, inspiré d’un texte de Colette, L’Envers du music-hall. Le jury du Festival de Cannes 2010 a tapé juste. L’histoire de ce manager, aussi paumé dans sa vie qu’attentif à ses strip-teaseuses qu’il embarque à travers la France, vaut par l’énergie que l’acteur-réalisateur lui insuffle.

Voici donc le récipiendaire Amalric au moment où les flashs s’affolent. “Merci, j’ai l’impression de revenir à la maison”, lance-t-il. “Je me suis effectivement entendu dire cela sans jamais avoir pensé à une phrase en particulier”, explique-t-il aujourd’hui.

“Revenir à la maison”… Drôle d’expression pour un homme qui s’est façonné, ces derniers temps, une carrière d’acteur en béton armé intelligent, naviguant du Scaphandre et le papillon à Steven Spielberg, d’un Conte de Noël à Alain Resnais et Luc Besson. Mais la maison, en l’occurrence, c’est autre chose : “Je suis tombé en cinéma, comme on dit tomber en amour, et j’ai toujours eu envie de fabriquer des films. Je voulais remercier les jurés de me ramener à ce désir-là.” Et ça se passe comment, une éducation cinéphile pour un jeune Parisien de milieu intello, “ambiance tendue” à la maison et télévision honnie? “Sur le tard. A 18 ans, j’ai un petit rôle dans Les Favoris de la lune, d’Otar Iosseliani. J’aime tout: les machines, les projecteurs, la caméra, les gens qui travaillent ensemble. Le plateau de tournage, c’est ma maison. J’ai envie de ça. J’arrête hypokhâgne.”

A l’époque, Mathieu Amalric n’est pas tout à fait un spectateur vierge, bien qu’il avoue n’avoir aucune “sexualité adolescente” -il est ainsi, l’animal, passant du coq à l’intime avec une faconde déconcertante. “Je suis en seconde, je vais au ciné-club de mon lycée, car c’est le seul moyen pour rentrer tard chez moi. Et je vois Baisers volés, de François Truffaut. Je découvre la légèreté. Plus tard, j’ai eu le dégoût de Truffaut, que je trouvais trop sage. J’y suis revenu.”

Vous voulez du vrac? Non? Tant pis. Parce que Mathieu Amalric, lancé comme une fusée joyeuse, débite du nom au mètre, tous découverts à sa majorité: “Avec Bergman, je me rends compte qu’on peut raconter des choses pas forcément plaisantes. Renoir, lui, m’a toujours donné une grande force. J’ai appris avec lui qu’il ne faut pas se mentir à soi-même. J’ai eu aussi ma période “grands réalisateurs aventureux”: Huston, Fuller, Von Stroheim… Eux m’ont appris que, pour faire du cinéma, il fallait d’abord avoir une vie. Ce que je n’avais pas à ce moment-là. Je m’en suis donc occupé.”

Au bout d’une heure d’entretien, enfin, est arrivé John Cassavetes, auquel on pense immédiatement lorsqu’on voit Tournée, qui ne joue jamais les personnages contre la mise en scène. “Son cinéma me transporte. On croit qu’on a de petites existences et lui montre qu’on traverse des drames shakespeariens tous les jours.” Etre ou ne pas être réalisateur. Etre.

Sortie en salle du film “Tournée” de Mathieu Amalric le 30 juin 2010

Source : L’Express

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